Une fois n’étant pas coutume, je vous propose d’examiner un arrêt rendu par … la chambre criminelle de la Cour de cassation, le 9 septembre 2014 (pourvoi n°13-85.985), présentant un certain intérêt pour le droit de l’urbanisme.

Cet arrêt tranche en effet la délicate question de savoir si le dépôt d’une déclaration préalable n’ayant pas donné lieu à la délivrance du récépissé prévu par l’article R. 423-3 du code de l’urbanisme est susceptible de faire naître, en l’absence d’opposition notifiée dans le délai d’instruction, une décision tacite de non-opposition à déclaration préalable.

Les faits étaient les suivants :

Le prévenu avait adressé à la Commune, en recommandé avec accusé de réception, une déclaration préalable visant l’édification d’une clôture. Estimant que le formulaire déposé n’était plus en usage (on croit comprendre, à la lecture de l’arrêt, que le prévenu avait en réalité déposé un formulaire de déclaration de travaux), la Commune avait refusé d’enregistrer la déclaration préalable et n’avait pas délivré de récépissé au pétitionnaire. À l’expiration du délai d’instruction et en l’absence de notification d’une décision d’opposition, celui-ci s’est estimé bénéficiaire d’une décision de non-opposition à déclaration préalable et il a réalisé les travaux déclarés.

Il a cependant été poursuivi pour des faits de construction sans déclaration préalable, de méconnaissance des dispositions du plan d’occupation des sols et de construction non conforme au plan de prévention des risques naturels. Le prévenu a été déclaré coupable de ces infractions et condamné à 2.000 euros d’amende par la Cour d’Appel d’Orléans. Il a donc formé un pourvoi en cassation.

Le pourvoi faisait notamment grief à la Cour d’Appel d’avoir considéré qu’il ne pouvait invoquer aucune décision implicite de non-opposition à déclaration préalable dès lors que, faute d’envoi du récépissé, le délai d’instruction de la déclaration n’avait pu commencer à courir.

La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel en considérant « que l’administration qui, saisie d’une déclaration de travaux par lettre recommandée avec accusé de réception, n’avait ni délivré de récépissé ni demandé de pièces complémentaires, telles qu’un formulaire dont elle aurait eu l’usage, avait implicitement et définitivement renoncé à s’opposer aux travaux de M. X. ».

La solution retenue par la Cour de cassation apparaît conforme à l’esprit des dispositions du code de l’urbanisme applicables.

L’article R. 423-3 du code de l’urbanisme dispose en effet que « le maire affecte un numéro d’enregistrement à la demande ou à la déclaration et en délivre récépissé dans des conditions prévues par arrêté du ministre chargé de l’urbanisme ». L’usage de l’indicatif ne laisse aucune marge de manœuvre à l’autorité administrative, qui semble ainsi tenue de délivrer récépissé de la déclaration déposée.

Le récépissé, introduit par la réforme des autorisations d’urbanisme entrée en vigueur le 1er octobre 2007, indique au pétitionnaire le délai d’instruction de droit commun et l’informe que l’autorité compétente pourra, dans un délai d’un mois, lui notifier que son dossier est incomplet ou que le délai d’instruction est différent de celui qui lui a été indiqué. Le récépissé participe ainsi de la volonté du législateur de sécuriser la situation du pétitionnaire et d’encadrer les délais d’instruction des demandes.

L’autorité administrative ne peut donc pas refuser de délivrer le récépissé au motif que la demande de permis ou la déclaration préalable serait, selon elle, irrecevable. Elle pourra, en revanche, notifier ultérieurement une demande de pièces complémentaires au pétitionnaire.

Dans le cas présent, il convient de signaler que le prévenu était également poursuivi pour des infractions tenant à la méconnaissance des dispositions du plan d’occupation des sols et au plan de prévention des risques naturels. L’incompatibilité du projet de clôture avec ces dispositions aurait dû conduire la Commune à s’opposer à la déclaration préalable.