Dans une décision en date du 8 juillet 2024, le Conseil d’État a apporté une importante précision concernant la « dérogation espèces protégées »
Le Conseil d’État rappelle, s’agissant en l’espèce d’un parc éolien susceptible de porter atteinte à la protection du vautour moine, espèce protégée, « qu’il appartient à l’autorité administrative de prendre, à tout moment, à l’égard de l’exploitant, les mesures qui se révèleraient nécessaires à la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts énumérés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement, notamment la protection de la nature et de l’environnement » et qu’ « il lui appartient, à cette fin, de prendre les mesures de nature à préserver les espèces animales non domestiques protégées ainsi que leurs habitats ».
Après avoir rappelé le principe de protection de ces espèces, fixé par l’article L. 411-1 du code de l’environnement et le cadre de la dérogation « espèces protégées » prévu par les articles R. 411-6 et suivants du même code, le Conseil d’État indique que « le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus impose d’examiner si l’obtention d’une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l’espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l’applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l’état de conservation des espèces protégées présentes », que « le pétitionnaire doit obtenir une dérogation « espèces protégées » si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé », qu’ « à ce titre, les mesures d’évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte » et que « dans l’hypothèse où les mesures d’évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l’administration, des garanties d’effectivité telles qu’elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu’il apparaisse comme n’étant pas suffisamment caractérisé, il n’est pas nécessaire de solliciter une dérogation « espèces protégées ». ».
L’apport principal de cette décision tient au fait que le Conseil d’État précise que « les dispositions des articles L. 181-2, L. 181-3, L. 181-22, L. 411-2 et R. 411-6 du code de l’environnement imposent, à tout moment, la délivrance d’une dérogation à la destruction ou à la perturbation d’espèces protégées dès lors que l’activité, l’installation, l’ouvrage ou les travaux faisant l’objet d’une autorisation environnementale ou d’une autorisation en tenant lieu comportent un risque suffisamment caractérisé pour ces espèces, peu important la circonstance que l’autorisation présente un caractère définitif ou que le risque en cause ne résulte pas d’une modification de cette autorisation ».
Par conséquent, la procédure de dérogation « espèces protégées » peut s’imposer à tout moment et, notamment, lors de la délivrance d’une modification même non substantielle de l’autorisation déjà délivrée.