Le certificat d’urbanisme est souvent vu comme un instrument privilégié en vue de sécuriser la situation d’un terrain au regard des règles d’urbanisme, en amont d’un éventuel futur projet d’aménagement ou de construction. Conformément aux dispositions de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme, il mentionne en effet « les dispositions d’urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d’urbanisme applicables à un terrain », pour le « certificat d’urbanisme d’information » et, dans le cas d’un « certificat d’urbanisme opérationnel », il « indique en outre (…) si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l’état des équipements publics existants ou prévus ». Par ailleurs, cet article confère à son bénéficiaire un intéressant effet de « cristallisation » puisque l’article L. 410-1 dispose que « lorsqu’une demande d’autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, les dispositions d’urbanisme, le régime des taxes et participations d’urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu’ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l’exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. ».
Cette sécurisation est cependant très relative, notamment lorsque le document d’urbanisme est en cours d’élaboration, de révision ou de modification, ce qui est assez fréquent. En effet, l’article L. 153-11 du code de l’urbanisme prévoit que l’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer « dans les conditions et délai prévus à l’article L. 424-1, sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan dès lors qu’a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable ». Afin de sécuriser la situation du bénéficiaire du certificat d’urbanisme, la loi ELAN (n°2018-1021) du 23 novembre 2018 a modifié l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme, qui prévoit désormais que « le certificat d’urbanisme précise alors expressément laquelle ou lesquelles des circonstances prévues aux deuxième à sixième alinéas de l’article L. 424-1 permettraient d’opposer le sursis à statuer ». Il convient de préciser que la jurisprudence retient que « si l’omission de la mention d’une telle possibilité dans le certificat d’urbanisme peut être, en vertu du cinquième alinéa de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme et du sixième alinéa de l’article A. 410-4 du même code, de nature à constituer un motif d’illégalité de ce certificat, elle ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente oppose un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis ultérieure concernant le terrain objet du certificat d’urbanisme » (Conseil d’État, 3 avril 2014, req. n° 362735, Lebon T.) et ce que quelque soit la nature du certificat d’urbanisme (Conseil d’État, 11 octobre 2017, req. n° 401878, Lebon T.).
La protection du bénéficiaire du certificat d’urbanisme est donc toute relative, ainsi que le confirme la décision du Conseil d’Etat du 14 novembre 2025 (req. n°493524).
Celle-ci rappelle qu’il résulte des dispositions des articles L. 410-1 (postérieures à la loi ELAN), de l’article L. 424-1 et L. 153-11 du code de l’urbanisme « qu’un certificat d’urbanisme délivré sur le fondement de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d’autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d’urbanisme applicables à la date de sa délivrance, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publiques », que « figure parmi ces règles la possibilité de se voir opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis, lorsqu’est remplie, à la date de délivrance du certificat, l’une des conditions énumérées à l’article L. 424-1 du code de l’urbanisme » et que « dans ce cas, il appartient à l’autorité administrative, conformément aux dispositions insérées à l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme par la loi du 23 novembre 2018 précitée, de préciser la condition sur le fondement de laquelle un sursis à statuer pourrait, le cas échéant, être opposé au titulaire du certificat d’urbanisme ».
L’arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Lyon objet du pourvoi avait interprété cette dernière obligation, au regard de l’objectif de transparence et de sécurité juridique poursuivi par la loi ELAN, comme « imposant de préciser, d’une part, le cas de figure permettant d’opposer un sursis à statuer, mais également, d’autre part, en quoi, en l’espèce, ce cas est susceptible de s’appliquer à la parcelle considérée » (Cour Administrative d’Appel de Lyon, 20 février 2024, req. n° 22LY03400). Cette interprétation, très intéressante, n’a cependant pas été suivie par le Conseil d’État.
Les conclusions de Monsieur Maxime BOUTRON, rapporteur public, relèvent ainsi que « dans l’articulation entre certificat et sursis, la cour a placé la barre assez haute s’agissant d’assurer la sécurité juridique des pétitionnaires » mais que cette lecture « va au-delà de la rédaction finale qui exige que soient précisées laquelle ou lesquelles des circonstances prévues aux deuxième à sixième alinéas de l’article L. 424-1 permettraient d’opposer le sursis à statuer, pas ensuite les conditions factuelles propres au projet qui y aboutiraient » et qu’« il y aurait une difficulté à autant figer en amont », dès lors que « tant le projet de PLU en cours d’élaboration que le projet envisagé par le demandeur sont encore, à la date de délivrance du certificat d’urbanisme, susceptibles d’évoluer jusqu’au dépôt de l’autorisation d’urbanisme proprement dite ».
Le Conseil d’Etat suit les conclusions de son rapporteur public et juge qu’en annulant le certificat d’urbanisme contesté en tant qu’il mentionne la possibilité d’un sursis à statuer « au motif que cette mention ne pouvait se borner à indiquer que la demande d’autorisation d’urbanisme pourrait faire l’objet d’un tel sursis en application de l’article L. 153-11 du code de l’urbanisme en raison de l’élaboration en cours du plan local d’urbanisme de la commune, mais devait préciser également en quoi, en l’espèce, les règles du futur plan étaient susceptibles de s’appliquer à la parcelle considérée », la Cour Administrative d’Appel a « entaché son arrêt d’une erreur de droit ».
Le degré de précision du certificat d’urbanisme et, par voie de conséquence, l’information de son bénéficiaire demeure donc assez limitée, malgré l’apport de la loi ELAN. De façon générale, il est important pour le bénéficiaire d’un certificat d’urbanisme de ne pas donner au simple document d’information une valeur supérieure à celle qu’il a réellement et de se faire assister et conseiller par un avocat lorsqu’il envisage de réaliser, à plus ou moins long terme, une opération de construction et d’aménagement sur un terrain.
